Par Pauline Walzak
Insolites Pays-Bas
Pauline est une photographe inspirée par les jeux d’ombre et de lumière, spécialisée dans les portraits.
Arrivée sur Amsterdam il y a six ans, elle a tout de suite été séduite par la lumière de cette ville d’eau et sensible aux spécificités culturelles qui s’offraient à elle lors de ses balades. Avec sa série “Pays-Bas insolites”, elle nous offre des moments de vie typiquement néerlandais et s’amuse des décalages qu’elle peut y voir avec ses propres expériences passées en France, à Londres ou à Sydney.
Grâce à elle, notre regard se pose tel celui d’un “nouveau venu” dans le pays : il s’amuse et s’étonne au gré de chaque découverte.
Sinterklaas Kapoentje
2023 touche à sa fin, marquant la conclusion d’une période de célébrations intenses qui débutent, dès novembre, avec l’arrivée, tant attendue, du vénéré Sinterklaas (à ne pas confondre avec le Père Noël). Tout droit venu d’Espagne, le Saint débarque sur son emblématique bateau à vapeur, accompagné de ses fidèles « Pieten ».
En venant de France, ma connaissance de la Saint-Nicolas se limitait à une célébration floue le 6 décembre, sans rien qui puisse véritablement rivaliser avec notre célèbre Père Noël. Ici, cependant, le « Sinterklaas » est une véritable institution. Entre le moment de son arrivée sur le territoire néerlandais et le 5 décembre, jour de son anniversaire, les enfants du pays déposent leurs chaussures tous les soirs et chantent avec enthousiasme des chansons dédiées, dans l’espoir de recevoir de modestes cadeaux (Schoencadeaus) avant le 5 décembre (Pakjesavond), lorsqu’ils reçoivent des cadeaux plus substantiels.
Ainsi, lors de ma deuxième année à Amsterdam, ma famille et moi avons été invités sur le bateau d’amis allemands pour assister à la joyeuse arrivée du Sinterklaas à Amsterdam, voguant sur la rivière Amstel. Tous les résidents étaient aux aguets : certaines familles se rassemblaient, comme nous, sur des bateaux pour suivre tranquillement la procession, tandis que d’autres profitaient du spectacle depuis les rives de la rivière ou depuis les ponts.
Je souhaitais immortaliser l’ensemble de la parade, où l’on pouvait voir la foule massée sur le « Torontobrug », s’animant à l’approche du Sinterklaas sur son bateau à vapeur, fendillant la foule de spectateurs. J’ai été frappée par les mesures prises par la municipalité (avec des bateaux de sauvetage technique et médical en alerte, des policiers en jet-ski etc…) pour garantir une distance sécurisée entre les bateaux de Sinterklaas, de ses Pieten et les autres bateaux de spectateurs. L’Amstel était littéralement noire de bateaux, mais tout s’est déroulé dans le style néerlandais, sans heurt ni incident, empreint de respect et de courtoisie, et saupoudré de joie !
Galerie
Sieste au bord d’un canal
Pendant mon court séjour à Amsterdam avant mon installation, j’ai eu la chance de profiter d’une promenade paisible en bateau le long des canaux pittoresques de la ville. Alors que je contemplais le paysage magnifique, j’ai remarqué trois hommes qui se prélassaient tranquillement au bord du canal. Leur attitude décontractée contrastait avec l’agitation et la vie trépidante de Londres, que j’avais l’habitude de côtoyer. Leurs jambes se balançaient sans effort au-dessus de l’eau, telles celles des enfants. Je me suis demandé s’ils étaient des visiteurs en pause ou des habitants profitant de ce bel après-midi d’avril. Quoi qu’il en soit, c’était, pour moi, un spectacle étonnant et relaxant à la fois.
Repas sur l’eau
J’ai pris cette photo alors que je n’habitais pas encore à Amsterdam. J’ai été étonnée et ravie de voir cette famille prendre son repas sur le toit de cette péniche. Tout l’espace de cette habitation flottante est utilisé. On a le sentiment que la frontière entre intérieur et extérieur est gommée, que ce que l’on penserait mobile est statique et inversement. Le mouvement du petit bateau en premier plan vient renforcer cette impression. À Amsterdam, un vent de liberté souffle dès qu’il est question de son lieu d’habitation et pour nous, Français, c’est peu banal.
Kerstboomverbanding
Je passais à vélo près de Museumplein avec ma famille début janvier 2017, quand nous avons aperçu au loin ce feu gigantesque. Curieux, nous nous sommes approchés et avons été assez étonnés du spectacle. Un amas de sapins de Noël brûlaient au milieu de la place, lancés dans les flammes avec force par des hommes gantés, entourés d’une masse de spectateurs agglutinés derrière des barrières métalliques. C’est la première fois que j’assistais à ce type d’événement qui m’a fait prendre conscience de la masse incongrue de sapins sacrifiés chaque année pour Noel ; pour quatre semaines de plaisir, ils finissent inexorablement à la poubelle, ou dans ce cas, dans des flammes.
C’est quoi le kerstboomverbanding ?
Tous les premiers dimanches de l’année, un grand nombre de sapins de Noël néerlandais et belges finissaient dans les flammes. Cette tradition était souvent l’occasion d’organiser une fête de village ou de quartier. Victime de son succès, la manifestation devenue ingérable sur le Museumplein d’Amsterdam a été interdite en 2018. Dorénavant, si vous souhaitez vous débarrasser de votre sapin, il suffit de le déposer à des points de collecte précis dans les deux semaines qui suivent la saint-Sylvestre. Même si cette tradition a perduré dans quelques villes, elle tend à disparaître complètement.
Bain de soleil
J’ai pris cette photo lors de mon premier vrai séjour à Amsterdam, juste avant que je ne m’installe. J’ai été frappée par le côté chill – aujourd’hui je dirais gezellig- des Néerlandais et par leur faculté à faire avec ce qu’il ont. Pas de balcon ? Pas de souci : un bord de fenêtre fera l’affaire. Le contraste avec Londres, où j’habitais alors, et les Londoniens était saisissant. Complètement insolites, les jambes dans le vide de cet homme évoquent, pour moi, le grand saut que je m’apprêtais à faire en déménageant.
